À partir du 4 février 2016, j’ai distribué neuf appareils photos à neuf bénévoles de l’association Mimir. Mes critères étaient les suivants : mixité, parité et diversité des générations. Je les ai donnés à des femmes et des hommes étant soit anciens, soit présents ou peut-être futurs habitants, soit bénévoles. Certains pouvaient être impliqués dans l’association depuis ses débuts, d’autres être parmi les derniers arrivés, en novembre 2015.
Ma demande était la suivante :
« J’aimerais savoir ce qu’est Mimir pour toi ? Qu’est-ce qui est important ? Et j’aimerais que tu me le montres avec des photos. Ensuite, je développerai ces photos, nous les regarderons ensemble et tu m’en parleras. L’entretien sera enregistré, puis j’en ferai un montage en mettant tes propres paroles sur les photos correspondantes. »
Les entretiens se sont déroulés en fonction des disponibilités de chacun, sur un temps allant du 17 avril 2016 au 20 août 2017. C’est en partant de ce travail préliminaire que j’ai commencé à écrire. J’ai retranscrit les divers discours en y adjoignant les photographies qui correspondaient. Il s’agissait là de relier tous ces regards pour mieux comprendre le fonctionnement présent du lieu, en attachant une grande importance à la continuité historique dans laquelle l’association Mimir s’inscrit depuis 2010.
Je leur ai laissé trois mois pour faire ce travail.
Certains étaient préoccupés : il n’était pas aisé pour eux de me dire ce qu’était Mimir au travers de photographies, puisque la maison était fermée. Je leur répondais alors qu’il n’y avait pas meilleur moment pour ce travail, car nous étions à un tournant de l’association. Ils l’ont confirmé lors des entretiens, où souvenirs passés et projections futures se sont mêlés dans la description des images.
J’ai choisi l’option de l’entretien libre, non-directif. Les photographies amenaient d’elles-mêmes la direction. J’ai numéroté chaque photo de la plus ancienne à la plus récente pour pouvoir les repérer. Lors de chaque entretien, j’ai commencé par réexpliquer la démarche anthropologique à mes interlocuteurs : « Tu te souviens avoir pris des photos ? Nous allons parler de chacune d’entre elles. Tu me les décris et tu m’en parles en gardant à l’esprit ma question initiale : c’est quoi Mimir pour toi ? Tu changes de photo quand tu le souhaites. Tout ce que je te demande, c’est de me donner le numéro de la photo avant de commencer à m’en parler. »
La durée des entretiens variait de vingt minutes à une heure quarante pour le plus long d’entre eux. Je suis peu intervenue et lorsqu’une question me venait à l’esprit, je laissais aller ma curiosité là où elle me menait. Ces entretiens ont ensuite été retranscrits pour que je puisse les analyser et en ressortir les expériences et les différents discours. Ce qui m’intéressait était de repérer ce qui se recoupait dans les propos de chacun, ce qui les réunissait et faisait contrat social. J’étais également très intéressée par ce qui, au contraire, pouvait tenir du discours singulier et des avis divergents. La maison Mimir étant ouverte à tous et un lieu de passage très fréquenté, comment pouvaient-ils constituer un groupe, malgré les désaccords ?
Ces entretiens ont permis de construire l’histoire récente de l’association.