Étape 1 de la fabrication du livre : vers l’impression

Nous sommes à la fin de l’année 2020 quand le livre, écrit et relu une bonne vingtaine de fois, est enfin prêt à être envoyé à l’impression, avec une grande nouveauté : un petit hérisson s’est invité sur la page de garde.

Apparition de L’Édition du Nigloo

Avec l’association Nigloo, nous nous sommes dit qu’il serait dommage de ne pas donner l’opportunité à d’autres personnes d’éditer leur livre. Toutes les compétences que j’ai acquises durant ces dernières années ne peuvent rester enfermées dans un tiroir. Cela irait à l’encontre de mes valeurs. Ces mêmes valeurs qui ont étayé le désir de publier mon livre. Ainsi, nous avons choisi de mettre mes nouvelles connaissances à disposition d’autres personnes désirant apprendre à fabriquer leur ouvrage pour le publier. Nous espérons aussi faire paraître régulièrement des écrits mêlant savoirs académiques, savoirs de terrains et témoignages en une revue d’université populaire ou chaque individu, professionnel ou non, mais toujours détenteur d’une expérience, pourrait apporter sa touche aux questionnements du moment. Ces réflexions sont en cour d’élaboration. Elles verront le jour si nous trouvons le lieu adéquat pour développer cette part de l’association (à-faire/à-suivre)…

Les prochains articles pourront donc être lus tel un tutoriel destiné au courageux et courageuses qui désireraient partager leur savoir, leur histoire, leur poésie en envisageant l’aventure de la fabrication d’un ouvrage en autonomie.

Afin d’imprimer les pages de ce recueil ethnographique, il a d’abord fallu acheter le papier. L’idée de fabriquer mon papier m’avait traversé l’esprit. Ce sera toutefois l’expérience d’un prochain livre. Cette première étape d’achat du papier pourrait sembler des plus banales au badaud débutant comme je l’ai été. Il ne s’agit là que de papier ma foi. Mais non, diantre ! Elle est décisive pour la reliure (merci Bertrand Magar !). Le papier est composé de fibres végétales qui s’enchevêtrent dans une même direction sous l’effet des rouleau de la machine qui le conçoit. Le papier a donc un sens. Une bonne reliure est, de surcroît, une reliure sensée. Une mauvaise disposition des grains rigidifierait le livre au point où il deviendrait difficile d’en tourner les pages. On peut observer les effets de la déformation rectiligne du papier en feuilletant ces vieux ouvrages oubliés dans le grenier de papy et mamie, ceux qui ont trente ans d’humidité emmagasinée. Quand il est bien conçut, on constate que les pages ondules verticalement par rapport au dos du livre. Un livre où les pages onduleraient horizontalement serait donc fort peu attrayant à la lecture, car les pages, comme un paquet solide, se tourneraient avec moult difficultés.

Une fois le papier récupéré, je suis partie au magasin d’usine, le 30 septembre 2020. J’avais toutes ces informations en poche et des chiffres plein la caboche. Dans les allées, je calculais. Le vendeur louchait vers moi, surpris par la bizarrerie de mon attitude de robot soliloquant. Dans les circuits neuronaux de mon esprit, il se passait plus ou moins ça :
« Donc, si je calcule bien, pour 100 livres de 312 pages, il faut 156 feuilles A4 pour un format de 17 par 24cm. J’ai donc besoin de 100 fois 156 feuilles. Ce qui nous fait un total de 15 600 feuilles. La feuille achetée mesure 45 par 64cm. [de temps en temps, je perdais le fil] J’en étais où ? Ah oui. Donc il me faut 100 fois 156 feuilles de 17 par 24. Je mets donc quatre A4 sur une grande feuille de 45/64. Ah, j’ai failli oublié ! Il faut que je fasse attention au sens des fibres du papier. Donc, peut-être que seulement trois feuilles A4 pourront être découpées sur le 45/64… Non. C’est bon [je vérifiai au moins six fois] : quatre feuille A4 entrent sur une grande feuille. Donc, il me faut 15 600 A4 divisé par 4 ce qui me fait un total de 3 900 feuilles 45/64. Sachant qu’il y en a 500 par paquet de 14 kilos, combien faut-il de paquets de feuilles ?… 1+1+… Il me faut donc 8 paquets de 14kg… »
Ma voiture accueillit ainsi plus de 120kg de feuilles, avec le papier de la couverture.

26 septembre 2020, Achat du papier

Le 5 novembre de la même année, le papier stocké partit avec moi pour la découpe. Cette étape, j’aurais pu, je dirais même plus, j’aurais dû m’en passer :

« Découpe du papier, ou comment envisager le saccage de 120 kilos de papier ?
Peu à peu, Les 4 000 feuilles de papiers 60/45cm furent réduites au format A4, un format de 21/29,7cm très précisément.

5 novembre 2020, Découpe

Pour une impression correcte, l’imprimeur m’avait bien dit qu’il était nécessaire de procéder avec justesse dans la découpe du papier : « 21cm, c’est 21 cm », m’avait-il répété.
Sauf que, chemin faisant, les précis 21cm se transformèrent aléatoirement en, tantôt 20,7cm, tantôt 21,1cm. Après douze heures de labeur à diviser méticuleusement chaque tas de feuille, l’un après l’autre, mesurant et remesurant à n’en plus finir les centimètres coupés, flirtant sans jamais toucher la barre du 21 pile, j’envisageais le pire :
« Si l’impression est centrée sur le papier (« calibrée », me semble-t-il), vais-je me retrouver à devoir massicoter une à une chacune des 15 600 feuilles ? »
Après une longue attente anxiogène, le 26 janvier 2021, j’allais enfin avoir ma réponse. Je partis sur les routes enneigées des Vosges, en direction de l’imprimeur, mes 120 kilos de papier sous le bras…

26 janvier 2021, Direction l’imprimerie Intertrace à Vanifosse (88)

Arrivée au milieu de monts vosgien, je présentai mon œuvre à l’imprimeur abasourdi : « Vous l’avez coupé à la hache votre papier ? », me questionna-t-il amusé.
Heureusement, mon cauchemar n’allait pas se réaliser. L’imprimeur me proposa gentiment de retailler ma montagne de papier avec son immense massicot professionnel, permettant une exploitation digne de mes ambitions.
À l’heure où j’écris ces lignes, les cent exemplaires du livre des Petits riens sont posés près de moi, en vrac, prêts à être reliés. Ce sera la prochaine étape de l’aventure. Pour tous les autres livres que l’Édition du Nigloo pourrait envisager de concevoir, je garderai bien à l’esprit que massicoter du papier avec une lame émoussée est une erreur lourde de conséquences. Cette erreur, je ne la ferai plus, pour sûre.
Pour sûre, j’en ferai d’autres…
Ce contenu a été publié dans De l'étude de terrain à l'autoédition du livre, avec comme mot(s)-clé(s) , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *